Francis Ngannou : “moi je combat pour ma liberté”


Source:eurosport

Le choc de titans tant attendu entre le champion du monde poids lourds Francis Ngannou et le champion intérimaire Cyril Gane a bel et bien eu lieu la nuit du 22 juin, aux alentours de 6h, heure de Paris, première défense de titre du prédator qui se solda par une victoire à la décision unanime. Un combat pour l’ UFC270 à la hauteur des attentes. Revivons ensemble cette palpitante rencontre sportive.

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Première défense de ceinture

Depuis son combat victorieux contre l’ex détenteur de la ceinture, Miocic en Mars 2021, Francis n’avait plus foulé le sol de la cage, la faute à une mésentente avec l’organisation la plus élevée de MMA au monde, l’UFC. Désireux de profiter de sa victoire avec son Cameroun natal, Francis avait refusé une proposition de l’UFC de défendre sa ceinture à peine un mois après sa détention. L’UFC décida alors d’organiser une lutte pour le titre de champion intérimaire entre le puncheur américain détenteur du record de KO, Derrick Lewis et l’excellent combattant invaincu jusque-là Cyril Gane, le surnomé Bon gamin.

Francis et Cyril étant tous les deux des produits de la célèbre organisation parisienne MMA Factory, une vidéo d’entraînement entre les deux poids lourds avait été diffusée, montrant une certaine égalité entre les deux et prédisant un choc à l’issue plus que indécise. Cette vidéo à priori anodine, publiée par le boss du MMA Factory, ancien coach de Francis, Fernand Lopez, fera couler beaucoup d’encre à la fois du côté de l’Hexagone et en France. Malgré tout ce remue-ménage, les deux combattants se sont toujours montrés un respect mutuel, même le jour de la pesée, fait assez rare dans ce sport où la mission de chacun est d’envoyer dormir le plus tôt possible son adversaire. Francis déclare à Cyril, yeux dans yeux la veille du combat: “Peu importe ce que tu penses, je te respecte. Ne laisse pas tout ça entrer dans ton cerveau. On se fera la guerre samedi mais je te respecte.”, de quoi calmer les ardeurs des détracteurs du prédator qui le jugeaient arrogant et pas reconnaissant de l’apport du MMA Factory dans sa carrière, sûrement convaincus par les propos répétés de Fernand Lopez, avec lequel la rupture s’est faite depuis quelques années.

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Cinq rounds de folie

5h30 dimanche matin, sonne l’heure de l’affrontement entre les deux mastodontes, qui débute avec un Bon gamin comme à son habitude très léger sur ses appuis, faisant presque oublier ses 112kg. Le champion du monde de kickboxing enchaîne low-kick, high-kick, feintes et jabs, touchant à plusieurs reprises le camerounais, sans le faire vaciller pour autant. Francis a beaucoup de mal à toucher le français de ses poings, tant ce dernier est mobile et virevoltant. C’est sur cette domination de Cyril que s’achève le premier round, le deuxième débutant dans la même direction. Il faudra attendre le troisième round pour voir le détenteur de la ceinture inquiéter son adversaire, déployant une lutte redoutable qui surprend tout le monde. En effet, Francis a fondé sa réputation sur sa puissance de frappe inégalée, tout le monde, y compris l’équipe de Cyril s’attendait donc à un combat majoritairement basé sur du striking, mais l’idée de Francis fût tout autre. Avait-il d’avance prévu d’amener Cyril au sol ou est-ce la domination subie pendant les dix premières minutes du combat qui lui ont fait changer de plan de jeu ? Cyril se retrouva alors à plusieurs reprises au sol, devant se défaire des 116kg de muscles reposant au-dessus de lui. Le champion de Muay Thaï perdit ainsi l’avantage du combat, laissant beaucoup d’énergie dans ces échanges de grappling auxquels il n’était pas habitué puisqu’en 10 combats de MMA c’était la première fois qu’il subissait un takedown. Malgré une tentative de soumission au cinquième round, Gane se fait dominer tout au long des 3 derniers rounds, perdant ainsi le combat à la décision unanime.

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Bon à savoir:
Le grappling désigne l’ensemble des techniques de contrôle, projection, immobilisation et soumission d’un adversaire dans un combat debout ou au sol, à mains nues. Les techniques de soumission incluent les luxations, étranglements et compressions.
Un takedown est une amenée au sol de l’adversaire par différentes techniques : single leg (amené au sol en attrapant une seule jambe) double leg (amené au sol en attrapant les deux jambes)


Photo by Chris Unger/Zuffa LLC

Un Francis une fois de plus surprenant

Il paraît évident, au vu de sa performance au sol, que Francis a bénéficié du soutien de son ami Kamaru Usman, champion UFC de la catégorie poids mi-moyen, initialement champion en lutte, et actuellement le combattant de toute l’histoire de l’UFC à avoir défendu le plus de takedowns. On avait découvert un Francis calme lors de la revanche face à Miocic, c’était sans imaginer que quelques mois plus tard, il aurait à ce point progressé dans un domaine plébiscité et indispensable pour chaque combattant, le grappling. Rappelons tout de même que lors de sa première défaite face à Miocic, ce dernier avait usé de sa lutte expérimentée pour épuiser et vaincre un Francis à l’époque assez limité au sol. Également, beaucoup remettaient en doute le cardio du champion, jugé limité. De nombreux pronostiqueurs voyaient donc soit une victoire par KO du predator au 2e round, soit une victoire à la décision pour Bon gamin s’il allait au bout des 5 rounds. Force est de constater que Francis progresse encore et encore. On se demande bien ce que le champion camerounais nous réserve pour la suite. Bonne chance dans tous les cas à son prochain adversaire, peut-être un certain Jon Jones ?

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Une revanche de Cyril ?

Cyril Gane est sûrement le combattant le plus technique de la division, et l’un des plus techniques de toute l’UFC, de par son héritage du kickboxing. Personne n’avait encore réussi à perdre contre Francis en allant au bout des 5 rounds. On ne peut donc que saluer la performance du Bon gamin qui a fortement embarrassé le champion pendant les deux premiers rounds. Il n’en fait nul doute qu’il faudra compter sur lui les mois, années à venir, ce n’est qu’une question de temps et probablement d’amélioration de sa lutte au sol avant qu’il ne détienne à son tour la ceinture. Déçu de sa prestation et revanchard, le natif de la Roche-sur-Yon espère un remake face au camerounais et promet d’apprendre de cette défaite et de revenir plus fort. A ce sujet, Francis ne voit aucun inconvénient à cette revanche, et a tenu également à saluer la prestation de son ancien compagnon d’entraînement. Toutefois, le Bon gamin devra sûrement passer par la case Miocic pour espérer affronter de nouveau le champion, un combat fort interessant sur le papier, au vu de la qualité de striking des deux combattants. Équipé de genouillères, le predator a révélé à la stupéfaction de tout le monde, avoir été victime il y a 3 semaines d’une rupture des ligaments. Son corps médical lui aurait même conseillé de reporter le combat. Stupéfiant !

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Perspectives d’évolution contractuelle

Ce n’est un secret pour personne, du moins pour aucun adepte de MMA, que la situation est assez tendue entre l’UFC et leur champion poids lourd depuis quelques mois. “Je ne me battrais plus pour 500 milles dollars” a déclaré dernièrement Francis. Ce dernier reproche ainsi à son employeur une bourse trop peu élevée au regard de ce que gagne le haut du panier des combattants de boxe ou même certains combattants de l’UFC à l’image d’un Conor Mcgregor.

A ce titre, McGregor pour son combat face à Dustin Poirier lors de l’ UFC264 aurait empoché la modique somme de 5 millions de dollars, soit presque 10 fois plus que Francis lors de son accession au trône des poids lourds. Un autre exemple, Tyson Fury, qui fait d’ailleurs un appel du pied au predator pour un affrontement en boxe, aurait empoché lors de sa défense de titre face au puncheur Wilder, la somme de 20 millions de dollars. Quand on voit la popularité que prend le MMA ces dernières années on se demande si un tel écart de rémunération est justifié, l’argument principal avancé étant le pay-per-view. Il semblerait que L’UFC espérait une victoire de Gane pour mettre fin aux négociations houleuses avec Francis. Grâce à sa victoire, nul ne doute que le bras de fer risque d’être encore plus serré, Francis voulant d’une part qu’une clause boxe soit intégrée à son contrat, à l’instar de McGregor, et également une nette augmentation de sa rémunération. Pas sûr que Dana White, le boss de l’UFC le voit du même œil, redoutant sûrement que Francis ouvre la porte à une révolution chez les combattants de son organisation qui réclameraient tous une meilleure rémunération. Il ne faudrait surtout pas que la fortune du boss estimée à plus de 500 millions de dollars y perde quelques plumes. Les prochains jours devraient nous en dire plus.

Bon à savoir:

Le pay per view (ppv) est un service de la télévision où le téléspectateur paie pour chaque émission qu’il regarde. Le système est dit « à la carte » par contraste avec la télévision payante, car l’usager ne paie que ce qu’il choisit et non le service dans sa globalité.

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Les leçons à tirer de ce combat

« Non, ce n’est pas simplement l’argent », a déclaré Ngannou. « Évidemment, l’argent en fait partie, mais c’est aussi le type de contrat avec lequel je ne suis pas d’accord. Je n’ai pas l’impression que c’est juste, je n’ai pas l’impression d’être libre. Je n’ai pas l’impression d’avoir été bien traité et c’est malheureux d’en arriver là. Mais je pense que tout le monde devrait avoir le droit de revendiquer ce qui est le mieux pour lui. Parce qu’au final, nous travaillons beaucoup dans ce métier. Nous usons notre corps. La moindre des choses est donc que nous puissions avoir un accord juste et équitable. » Quand le journaliste de RMC lui rétorque qu’avec sa victoire il est en position de force pour la négociation, Francis lui dit: « je ne dirais pas en position de force, moi je combat la liberté, l’indépendance, je combat mon droit. Je pense que tout être humain devrait être dans cette position sans toutefois être champion. Je pense que chaque combattant devrait être en position de s’exprimer, de revendiquer ce qui lui est dû, sans toutefois avoir peur des représailles. ». Plus qu’un simple combat d’arts martiaux, une bataille pour la liberté ! Ces mots du champion sont en parfait accord avec son parcours atypique qui force le respect. Rappelons juste qu’il y a à peine 8 ans de cela que Francis était encore un simple sdf à Paris. Difficile de ne pas tirer des tonnes de leçons de vie d’une histoire si particulière:

  • Toujours croire en ses rêves, mais surtout se faire confiance et croire en soi-même
  • Il n’y a pas d’âge pour voir le bout du tunnel, tout vient à temps à celui qui sait attendre
  • Pas besoin d’être le favoris ou le préféré de la foule pour la faire gémir et exalter de plaisir
  • Champion du monde ou pas, chaque être humain mérite de réclamer ce qui lui est dû, ce qui est juste

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Alors quelles sont vos impressions de ce combat titanesque ? Team Predator ou team Bon gamin ?


Ludovic Tchoupe,

aka Tramel

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